50 années perdues, “Energy Strategy: The Road [actually] Not Taken”
Préambule
Synthèse et extraits d’un long texte (prémonitoire) de 1976 qui a donné les bases de la sobriété et de l’approche Négawatt. Rédigé par Amory Lovins, ce texte parle des chemins possibles vers une transition du monde (transition énergétique mais pas que) :
Energy Strategy: The Road Not Taken?
Le texte d’origine est par ici (RMI.org)➜ https://rmi.org/insight/energy-strategy-the-road-not-taken/
Ce texte propose deux chemins bien différents qu’on pourrait résumer en celui de l’efficacité et celui de la sobriété et surtout il évoque les choix à faire à l’époque et ce que cela pourrait changer dans le futur (aujourd’hui donc).
❝ Il y a la “hard path / voie dure” et la “soft path / voie douce”. La voie dure ressemble à la politique fédérale de l’époque et est essentiellement une extrapolation du passé récent. La voie dure repose sur l’expansion rapide des high techs centralisées afin d’augmenter l’offre d’énergie, en particulier sous forme d’électricité. La voie douce combine un engagement rapide et résolu en faveur d’une utilisation efficace de l’énergie, le développement rapide de sources d’énergie renouvelables adaptées, en termes d’échelle et de qualité énergétique, aux besoins des utilisateurs finaux, et des technologies transitoires spéciales pour les combustibles fossiles.
J’ai fait exprès de laisser le texte anglais mais j’ai à chaque fois traduit en français.
Ce texte vaut le coup puisqu’il est encore bien d’actualité et qu’il permet de comprendre ce qu’on n’a pas fait pendant 50 ans, sans doute pour essayer de l’accomplir maintenant.
Il est d’autant plus d’actualité que les chercheurs du GIEC ont réussi à inscrire la sobriété dans la synthèse du 6eme rapport et ils ont montré son importance dans la lutte contre le changement climatique surtout pour l’architecture et le monde du bâtiment en général. Cela doit devenir un axe central de nos stratégies bas carbone, autant lire l’original !
NOTA : si, pour une raison ou une autre, vous êtes contre Negawatt avec leur approche anti-nucleaire, cette lecture en devient presque plus intéressante
NOTA2 : en italique le texte anglais, ❝ c’est ma traduction et ➜ mes commentaires
A savoir avant de lire
Sans prendre parti, mais afin de comprendre la logique, A. Lovins répartie les énergies en 4 types :
- Le charbon, une énergie à abandonner
- Le pétrole et le gaz, des énergies à abandonner mais qui peuvent (doivent) servir temporairement à la transition
- Le nucléaire à abandonner avec, entre autres, une raison propre à l’époque, la non-prolifération de l’arme atomique.
- Des énergies de flux par opposition aux énergies de capital (et donc finies et avec une limite physique)
Un texte en avance sur son temps
Un texte très complet et parfois prémonitoire, quelques exemples :
The commitment to a long-term coal economy many times the scale of today’s makes the doubling of atmospheric carbon dioxide concentration early in the next century virtually unavoidable, with the prospect then or soon thereafter of substantial and perhaps irreversible changes in global climate.
❝ L’engagement en faveur d’une économie du charbon à long terme, plusieurs fois supérieure à celle d’aujourd’hui, rend pratiquement inévitable le doublement de la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère au début du siècle prochain, avec la perspective, à ce moment-là ou peu après, de changements substantiels et peut-être irréversibles dans le climat mondial.
➜ un texte de 1976 alors que la création GIEC c’est seulement en 1988. La science connaissait déjà bien les phénomènes mais c’est quand même à noter.
The barriers to far more efficient use of energy are not technical, nor in any fundamental sense economic. So why do we stand here confronted, as Pogo said, by insurmountable opportunities?
❝ Les obstacles à une utilisation beaucoup plus efficace de l’énergie ne sont ni techniques, ni fondamentalement économiques. Alors pourquoi sommes-nous ici confrontés, comme le disait Pogo, à des opportunités insurmontables ?
Then over the period 2010–40, we should be able to shrink per capita primary energy use to perhaps a third or a quarter of today’s. (The former would put us at the per capita level of the wasteful, but hardly troglodytic, French.) Even in the case of fourfold shrinkage, the resulting society could be instantly recognizable to a visitor from the 1960s and need in no sense be a pastoralist’s utopia — though that option would remain open to those who may desire it.
❝ Ensuite, au cours de la période 2010–40, nous devrions être en mesure de réduire la consommation d’énergie primaire par habitant à peut-être un tiers ou un quart de celle d’aujourd’hui. (Dans le premier cas, nous serions au niveau par habitant des Français, qui gaspillent mais ne sont pas pour autant des troglodytes). Même dans le cas d’une réduction par quatre, la société qui en résulterait pourrait être immédiatement reconnaissable pour un visiteur des années 1960 et n’aurait nullement besoin d’être une utopie pastorale — bien que cette option reste ouverte à ceux qui le désirent.
➜ 2 sujets, le premier c’est que nous n’avons pas atteint l’objectif de division par 4 (cf données) et le deuxième est de penser à la fameuse phrase sur les Amish, Lovins contredit ainsi E. Macron
The long-term mix of technical fixes with structural and value changes in work, leisure, agriculture and industry will require much trial and error. It will take many years to make up our diverse minds about. It will not be easy — merely easier than not doing it. Meanwhile it is easy only to see what not to do.
❝ Le mélange, à long terme, de solutions techniques ainsi que des changements structurels et de valeurs dans le travail, les loisirs, l’agriculture et l’industrie, nécessitera de nombreux essais et erreurs. Il faudra de nombreuses années pour que nous puissions nous faire une idée de la manière dont nous devons nous comporter. Ce ne sera pas facile — seulement plus facile que de ne pas le faire. En attendant, il est facile de voir ce qu’il ne faut pas faire.
making political decisions about nuclear hazards which are compulsory, remote from social experience, disputed, unknown, or unknowable, may tempt governments to bypass democratic decision in favor of elitist technocracy.
❝ La prise de décisions politiques sur les risques nucléaires, qui sont obligatoires, éloignées de l’expérience sociale, contestées, inconnues ou inconnaissables, peut inciter les gouvernements à contourner la décision démocratique au profit d’une technocratie élitiste.
➜ on ne fait pas plus actuel
Les 2 chemins possibles
by outlining and contrasting two energy paths that the United States might follow over the next 50 years
❝ en décrivant et en opposant deux voies énergétiques que les États-Unis pourraient suivre au cours des 50 prochaines années.
The first path resembles present federal policy and is essentially an extrapolation of the recent past. It relies on rapid expansion of centralized high technologies to increase supplies of energy, especially in the form of electricity. The second path combines a prompt and serious commitment to efficient use of energy, rapid development of renewable energy sources matched in scale and in energy quality to end-use needs, and special transitional fossil-fuel technologies. This path, a whole greater than the sum of its parts, diverges radically from incremental past practices to pursue long-term goals.
❝ La première voie ressemble à la politique fédérale actuelle et est essentiellement une extrapolation du passé récent. Elle s’appuie sur une expansion rapide des hautes technologies [high tech] centralisées pour accroître l’offre d’énergie, notamment sous forme d’électricité. La deuxième voie combine un engagement rapide et sérieux en faveur de l’utilisation efficace de l’énergie, le développement rapide de sources d’énergie renouvelables dont l’échelle et la qualité énergétique correspondent aux besoins des utilisateurs finaux, et des technologies de transition spéciales pour les combustibles fossiles. Cette voie, un tout plus grand que la somme de ses parties, s’écarte radicalement des pratiques progressives du passé pour poursuivre des objectifs à long terme.
The second path, though it represents a shift in direction, offers many social, economic and geopolitical advantages, including virtual elimination of nuclear proliferation from the world. It is important to recognize that the two paths are mutually exclusive. Because commitments to the first may foreclose the second, we must soon choose one or the other — before failure to stop nuclear proliferation has foreclosed both.
❝ La seconde voie, bien qu’elle représente un changement de direction, offre de nombreux avantages sociaux, économiques et géopolitiques, notamment l’élimination virtuelle de la prolifération nucléaire dans le monde. Il est important de reconnaître que les deux voies s’excluent mutuellement. Étant donné que les engagements en faveur de la première voie peuvent exclure la seconde, nous devons rapidement choisir l’une ou l’autre — avant que l’incapacité à stopper la prolifération nucléaire ne les exclue toutes les deux.
https://www.ademe.fr/les-futurs-en-transition/
There exists today a body of energy technologies that have certain specific features in common and that offer great technical, economic and political attractions, yet for which there is no generic term. For lack of a more satisfactory term, I shall call them “soft” technologies: a textural description, intended to mean not vague, mushy, speculative or ephemeral, but rather flexible, resilient, sustainable and benign. Energy paths dependent on soft technologies, illustrated in Figure 2, will be called “soft” energy paths, as the “hard” technologies sketched in Section II constitute a “hard” path (in both senses). The distinction between hard and soft energy paths rests not on how much energy is used, but on the technical and sociopolitical structure of the energy system, thus focusing our attention on consequent and crucial political differences.
❝ Il existe aujourd’hui un ensemble de technologies énergétiques qui ont en commun certaines caractéristiques spécifiques et qui présentent de grands attraits techniques, économiques et politiques, mais pour lesquelles il n’existe pas de terme générique. À défaut d’un terme plus satisfaisant, je les appellerai technologies “douces” : une description textuelle, destinée à signifier non pas vague, pâteux, spéculatif ou éphémère, mais plutôt flexible, résilient, durable et bénin. Les parcours énergétiques dépendant des technologies douces, illustrés dans la figure 2, seront appelés parcours énergétiques “doux”, car les technologies “dures” esquissées dans la section II constituent un parcours “dur” (dans les deux sens du terme). La distinction entre les voies énergétiques dures et douces ne repose pas sur la quantité d’énergie utilisée, mais sur la structure technique et sociopolitique du système énergétique, ce qui concentre notre attention sur des différences politiques conséquentes et cruciales.
➜ En couleur c’est un ajout de ma part avec les données actuelles…et donc un bon loupé sur les technologies et la sobriété. 50 années de perdues
soft technologies. These are defined by five characteristics:
- They rely on renewable energy flows that are always there whether we use them or not, such as sun and wind and vegetation: on energy income, not on depletable energy capital.
- They are diverse, so that energy supply is an aggregate of very many individually modest contributions, each designed for maximum effectiveness in particular circumstances.
- They are flexible and relatively low-technology — which does not mean unsophisticated, but rather, easy to understand and use without esoteric skills, accessible rather than arcane.
- They are matched in scale and in geographic distribution to end-use needs, taking advantage of the free distribution of most natural energy flows.
- They are matched in energy quality to end-use needs: a key feature that deserves immediate explanation.
❝ les technologies douces. Celles-ci sont définies par cinq caractéristiques :
- Elles s’appuient sur des flux d’énergie renouvelable qui sont toujours là, que nous les utilisions ou non, comme le soleil, le vent et la végétation : sur des revenus énergétiques, et non sur un capital énergétique épuisable.
- Elles sont diversifiées, de sorte que l’approvisionnement en énergie est un agrégat de très nombreuses contributions individuelles modestes, chacune conçue pour une efficacité maximale dans des circonstances particulières.
- Elles sont flexibles et relativement peu technologiques — ce qui ne veut pas dire non sophistiquées, mais plutôt faciles à comprendre et à utiliser sans compétences ésotériques, accessibles plutôt qu’obscurs.
- Elles sont adaptées en termes d’échelle et de distribution géographique aux besoins des utilisateurs finaux, en tirant parti de la libre distribution de la plupart des flux énergétiques naturels.
- Elles sont adaptées aux besoins des utilisateurs finaux en termes de qualité de l’énergie : une caractéristique clé qui mérite une explication immédiate.
➜ Une définition très pertinente de mon point de vue
To fuse into a coherent strategy the benefits of energy efficiency and of soft technologies, we need one further ingredient: transitional technologies that use fossil fuels briefly and sparingly to build a bridge to the energy-income economy of 2025, conserving those fuels — especially oil and gas — for petrochemicals (ammonia, plastics, etc.) and leaving as much as possible in the ground for emergency use only.
❝ Pour fusionner dans une stratégie cohérente les avantages de l’efficacité énergétique et des technologies douces, nous avons besoin d’un autre ingrédient : des technologies de transition qui utilisent les combustibles fossiles brièvement et avec parcimonie pour jeter un pont vers l’économie à revenu énergétique de 2025, en conservant ces combustibles — en particulier le pétrole et le gaz — pour la pétrochimie (ammoniac, plastiques, etc.) et en laissant autant que possible dans le sol pour une utilisation d’urgence uniquement.
In sum, Figure 2 outlines a prompt redirection of effort at the margin that lets us use fossil fuels intelligently to buy the time we need to change over to living on our energy income. The innovations required, both technical and social, compete directly and immediately with the incremental actions that constitute a hard energy path: fluidized beds vs. large coal gasification plants and coal-electric stations, efficient cars vs. offshore oil, roof insulation vs. Arctic gas, cogeneration vs. nuclear power.
❝ En résumé, la figure 2 présente une réorientation rapide des efforts à la marge qui nous permet d’utiliser intelligemment les combustibles fossiles pour gagner le temps nécessaire pour passer à un mode de vie basé sur nos revenus énergétiques. Les innovations requises, tant techniques que sociales, sont en concurrence directe et immédiate avec les actions incrémentales qui constituent une voie énergétique dure [hard path] : lits fluidisés contre grandes usines de gazéification du charbon et centrales électriques au charbon, voitures efficaces contre pétrole offshore, isolation des toits contre gaz arctique, cogénération contre énergie nucléaire.
Les aspects sociologiques
Soft technologies do not carry with them inappropriate cultural patterns or values; they capitalize on poor countries’ most abundant resources (including such protein-poor plants as cassava, eminently suited to making fuel alcohols), helping to redress the severe energy imbalance between temperate and tropical regions; they can often be made locally from local materials and do not require a technical elite to maintain them; they resist technological dependence and commercial monopoly;
❝ Les technologies douces ne véhiculent pas de modèles ou de valeurs culturels inappropriés ; elles tirent parti des ressources les plus abondantes des pays pauvres (y compris des plantes pauvres en protéines comme le manioc, parfaitement adapté à la fabrication d’alcools combustibles), contribuant ainsi à corriger le grave déséquilibre énergétique entre les régions tempérées et tropicales ; elles peuvent souvent être fabriquées localement à partir de matériaux locaux et ne nécessitent pas l’intervention d’une élite technique pour les entretenir ; elles résistent à la dépendance technologique et au monopole commercial ;
Nucléaire
For all these reasons, if nuclear power were clean, safe, economic, assured of ample fuel, and socially benign per se, it would still be unattractive because of the political implications of the kind of energy economy it would lock us into.
❝ Pour toutes ces raisons, si l’énergie nucléaire était propre, sûre, économique, assurée de disposer de suffisamment de combustible et socialement bénigne en soi, elle resterait peu attrayante en raison des implications politiques du type d’économie énergétique dans laquelle elle nous enfermerait.
Sobriété — Frugalité, les extraits à lire
Since we can’t keep the bathtub filled because the hot water keeps running out, do we really (as Malcolm MacEwen asks) need a bigger water heater, or could we do better with a cheap, low-technology plug?
❝ Puisque nous ne pouvons pas garder la baignoire remplie parce que l’eau chaude s’épuise sans cesse, avons-nous vraiment (comme le demande Malcolm MacEwen) besoin d’un plus gros chauffe-eau, ou pourrions-nous faire mieux avec une prise bon marché et de faible technologie ?
➜ l’analogie de la baignoire fonctionne aussi pour le budget carbone de la planète
There are two ways, divided by a somewhat fuzzy line, to do more with less energy. First, we can plug leaks and use thriftier technologies to produce exactly the same output of goods and services — and bads and nuisances — as before, substituting other resources (capital, design, management, care, etc.) for some of the energy we formerly used. When measures of this type use today’s technologies, are advantageous today by conventional economic criteria, and have no significant effect on lifestyles, they are called “technical fixes.”
❝ Il existe deux façons, séparées par une frontière quelque peu floue, de faire plus avec moins d’énergie. Premièrement, nous pouvons colmater les fuites et utiliser des technologies plus économes pour produire exactement la même quantité de biens et de services — et de nuisances — qu’auparavant, en substituant d’autres ressources (capital, conception, gestion, soins, etc.) à une partie de l’énergie que nous utilisions auparavant. Lorsque des mesures de ce type utilisent les technologies d’aujourd’hui, qu’elles sont avantageuses aujourd’hui selon les critères économiques classiques et qu’elles n’ont pas d’effet significatif sur les modes de vie, elles sont appelées “solutions techniques”.
In addition, or instead, we can make and use a smaller quantity or a different mix of the outputs themselves, thus to some degree changing (or reflecting ulterior changes in) our life-styles. We might do this because of changes in personal values, rationing by price or otherwise, mandatory curtailments, or gentler inducements. Such “social changes” include car-pooling, smaller cars, mass transit, bicycles, walking, opening windows, dressing to suit the weather, and extensively recycling materials. Technical fixes, on the other hand, include thermal insulation, heat-pumps (devices like air conditioners which move heat around — often in either direction — rather than making it-from scratch), more efficient furnaces and car engines, less overlighting and overventilation in commercial buildings, and recuperators for waste heat in industrial processes.
❝ En outre, ou à la place, nous pouvons fabriquer et utiliser une plus petite quantité ou un mélange différent des produits eux-mêmes, modifiant ainsi dans une certaine mesure (ou reflétant des changements ultérieurs dans) nos styles de vie. Cela peut être dû à des changements de valeurs personnelles, à un rationnement par le prix ou autre, à des restrictions obligatoires ou à des incitations plus douces. Ces “changements sociaux” comprennent le covoiturage, les voitures plus petites, les transports en commun, les bicyclettes, la marche, l’ouverture des fenêtres, l’adaptation des vêtements au temps qu’il fait et le recyclage généralisé des matériaux. Les solutions techniques, quant à elles, comprennent l’isolation thermique, les pompes à chaleur (des appareils comme les climatiseurs qui déplacent la chaleur — souvent dans les deux sens — plutôt que de la produire à partir de rien), des fours et des moteurs de voiture plus efficaces, moins de suréclairage et de surventilation dans les bâtiments commerciaux, et des récupérateurs de chaleur perdue dans les processus industriels.
➜ ICI (au dessus hein) TOUT EST DIT !
Civilization in this country, according to some, would be inconceivable if we used only, say, half as much electricity as now. But that is what we did use in 1963, when we were at least half as civilized as now. What would life be like at the per capita levels of primary energy that we had in 1910, (about the present British level) but with doubled efficiency of energy use and with the important but not very energy-intensive amenities we lacked in 1910, such as telecommunications and modern medicine? Could it not be at least as agreeable as life today? Since the energy needed today to produce a unit of GNP varies more than 100-fold depending on what good or service is being produced, and since GNP in turn hardly measures social welfare, why must energy and welfare march forever in lockstep? Such questions today can be neither answered nor ignored.
❝ La civilisation dans ce pays, selon certains, serait inconcevable si nous n’utilisions que, disons, la moitié de l’électricité actuelle. C’est pourtant ce que nous utilisions en 1963, lorsque nous étions au moins deux fois moins civilisés qu’aujourd’hui. À quoi ressemblerait la vie avec les niveaux d’énergie primaire par habitant que nous avions en 1910 (à peu près le niveau britannique actuel), mais avec une efficacité doublée de l’utilisation de l’énergie et avec les commodités importantes mais peu gourmandes en énergie qui nous manquaient en 1910, comme les télécommunications et la médecine moderne ? Ne serait-il pas au moins aussi agréable de vivre qu’aujourd’hui ? Puisque l’énergie nécessaire aujourd’hui pour produire une unité de PNB varie plus de 100 fois selon le bien ou le service produit, et puisque le PNB ne mesure guère le bien-être social, pourquoi l’énergie et le bien-être doivent-ils marcher éternellement au pas ? Aujourd’hui, on ne peut ni répondre à de telles questions ni les ignorer.
Underlying energy choices are real but tacit choices of personal values. Those that make a high-energy society work are all too apparent. Those that could sustain life-styles of elegant frugality are not new; they are in the attic and could be dusted off and recycled. Such values as thrift, simplicity, diversity, neighborliness, humility and craftsmanship — perhaps most closely preserved in politically conservative communities — are already, as we see from the ballot box and the census, embodied in a substantial social movement, camouflaged by its very pervasiveness. Offered the choice freely and equitably, many people would choose, as Herman Daly puts it, “growth in things that really count rather than in things that are merely countable”: choose not to transform, in Duane Elgin’s phrase, “a rational concern for material well-being into an obsessive concern for unconscionable levels of material consumption.”
❝ Les choix énergétiques sont sous-jacents à des choix réels et implicites de valeurs personnelles. Les choix qui font fonctionner une société à haute énergie ne sont que trop apparents. Ceux qui pourraient soutenir des styles de vie d’une frugalité élégante ne sont pas nouveaux ; ils sont dans le grenier et pourraient être dépoussiérés et recyclés. Des valeurs telles que l’économie, la simplicité, la diversité, le voisinage, l’humilité et l’artisanat — qui sont peut-être le mieux préservées dans les communautés politiquement conservatrices — sont déjà, comme nous le voyons dans les urnes et les recensements, incarnées dans un mouvement social important, camouflé par son omniprésence. Si on leur offrait le choix librement et équitablement, beaucoup de gens choisiraient, comme le dit Herman Daly, “la croissance dans les choses qui comptent vraiment plutôt que dans les choses qui sont simplement comptabilisables” : ils choisiraient de ne pas transformer, selon l’expression de Duane Elgin, “un souci rationnel du bien-être matériel en un souci obsessionnel de niveaux déraisonnable de consommation matérielle”.
➜ On peut y voir une critique de la sur-consommation
In the new age of scarcity, our ingenious strivings to substitute abstract (therefore limitless) wants for concrete (therefore reasonably bounded) needs no longer seem so virtuous. But where we used to accept unquestioningly the facile (and often self-serving) argument that traditional economic growth and distributional equity are inseparable, new moral and humane stirrings now are nudging us. We can now ask whether we are not already so wealthy that further growth, far from being essential to addressing our equity problems, is instead an excuse not to mobilize the compassion and commitment that could solve the same problems with or without the growth.
❝ Dans la nouvelle ère de la rareté, nos efforts ingénieux pour substituer des désirs abstraits (donc illimités) à des besoins concrets (donc raisonnablement limités) ne semblent plus aussi vertueux. Mais là où nous acceptions sans broncher l’argument facile (et souvent intéressé) selon lequel la croissance économique traditionnelle et l’équité de la répartition sont inséparables, de nouveaux élans moraux et humains nous poussent à agir. Nous pouvons maintenant nous demander si nous ne sommes pas déjà si riches que la poursuite de la croissance, loin d’être essentielle pour résoudre nos problèmes d’équité, est plutôt une excuse pour ne pas mobiliser la compassion et l’engagement qui pourraient résoudre les mêmes problèmes avec ou sans croissance.
➜ Le nouveau travail d’un ingénieur, l’ingénieur lowtech
The most important, difficult, and neglected questions of energy strategy are not mainly technical or economic but rather social and ethical. They will pose a supreme challenge to the adaptability of democratic institutions and to the vitality of our spiritual life.
❝ Les questions les plus importantes, les plus difficiles et les plus négligées de la stratégie énergétique ne sont pas seulement techniques ou économiques, mais plutôt sociales et éthiques. Elles poseront un défi considérable à la capacité d’adaptation des institutions démocratiques et à la vitalité de notre vie spirituelle.
La notion d’éxergie
Plainly we are using premium fuels and electricity for many tasks for which their high energy quality is superfluous, wasteful and expensive, and a hard path would make this inelegant practice even more common. Where we want only to create temperature differences of tens of degrees, we should meet the need with sources whose potential is tens or hundreds of degrees, not with a flame temperature of thousands or a nuclear temperature of millions — like cutting butter with a chainsaw.
❝ Il est clair que nous utilisons des combustibles de première qualité et de l’électricité pour de nombreuses tâches pour lesquelles leur haute qualité énergétique est superflue, gaspilleuse et coûteuse, et une voie dure rendrait cette pratique inélégante encore plus courante. Lorsque nous voulons seulement créer des différences de température de quelques dizaines de degrés, nous devons répondre à ce besoin avec des sources dont le potentiel est de quelques dizaines ou centaines de degrés, et non avec une température de flamme de plusieurs milliers ou une température nucléaire de plusieurs millions, comme si l’on coupait du beurre avec une tronçonneuse.
Parler en service rendu plutôt qu’en kWh
People do not want electricity or oil, nor such economic abstractions as “residential services,” but rather comfortable rooms, light, vehicular motion, food, tables, and other real things. Such end-use needs can be classified by the physical nature of the task to be done.
❝ Les gens ne veulent pas d’électricité ou de pétrole, ni d’abstractions économiques telles que les “services résidentiels”, mais plutôt des pièces confortables, de la lumière, des déplacements en voiture, de la nourriture, des tables et d’autres choses réelles. Ces besoins d’utilisation finale peuvent être classés en fonction de la nature physique de la tâche à accomplir.
Quelques conclusions
Enterprises like nuclear power are not only unnecessary but a positive encumbrance for they prevent us, through logistical competition and cultural incompatibility, from pursuing the tasks of a soft path at a high enough priority to make them work together properly. A hard path can make the attainment of a soft path prohibitively difficult, both by starving its components into garbled and incoherent fragments and by changing social structures and values in a way that makes the innovations of a soft path more painful to envisage and to achieve.
❝ Les entreprises du type de l’énergie nucléaire ne sont pas seulement inutiles, mais elles constituent un fardeau positif, car elles nous empêchent, en raison de la concurrence logistique et de l’incompatibilité culturelle, de poursuivre les tâches d’une voie douce avec une priorité suffisamment élevée pour qu’elles puissent fonctionner ensemble correctement. Une voie dure peut rendre la réalisation d’une voie douce très difficile, à la fois en réduisant ses composantes à des détails confus et incohérents et en changeant les structures et les valeurs sociales d’une manière qui rend les innovations d’une voie douce plus difficiles à envisager et à réaliser.
Indeed, one of the infinite variations on a soft path seems inevitable, either smoothly by choice now or disruptively by necessity later; and I fear that if we do not soon make the choice, growing tensions between rich and poor countries may destroy the conditions that now make smooth attainment of a soft path possible.
❝ En effet, l’une des variations infinies de la voie douce semble inévitable, que ce soit en douceur par choix aujourd’hui ou par nécessité plus tard ; et je crains que si nous ne faisons pas rapidement ce choix, les tensions croissantes entre les pays riches et les pays pauvres ne détruisent les conditions qui rendent aujourd’hui possible la réalisation en douceur d’une voie douce.
➜ Malgré son avertissement, il n’est pas encore trop tard pour la sobriété choisie plutôt que subie
Thus if neither the soft nor the hard path were preferable on cost or other grounds, we would still be wise to use our remaining cheap fossil fuels — sparingly — to finance a transition as nearly as possible straight to our ultimate energy-income sources. We shall not have another chance to get there.
❝ Ainsi, si ni la voie douce ni la voie dure ne sont préférables pour des raisons de coût ou autres, il serait toujours sage d’utiliser les combustibles fossiles bon marché qui nous restent — avec parcimonie — pour servir de transition aussi directe que possible vers des sources ultimes d’énergie de flux. Nous n’aurons pas d’autre occasion d’y parvenir.
➜ La guerre en Ukraine nous a rappelé brutalement que nous avons perdu 50 ans….Il n’est pas trop tard.